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Inflation normative : un rapport foisonnant
Les deux élus chargés par le Premier ministre d’une mission d’évaluation des normes, Alain Lambert et Jean-Claude Boulard, lui ont remis leur rapport mardi 26 février. Sur un ton volontairement décalé et plein d’humour, les auteurs multiplient les propositions de fond visant à alléger le poids des normes en France. Tour d’horizon de leurs principales suggestions.
Alléger le stock de normes
En préambule, les auteurs rappellent que toute norme a vocation à être interprétée. Égratignant au passage la place prise par les DREAL, « nouvelle puissance émettrice d’avis et d’interprétation des normes », ils proposent que cette mission soit confiée aux préfets de département.
Quatre types d’actions permettant d’alléger le stock sont ensuite mentionnés :
- abroger les normes les plus absurdes. Est cité en exemple le décret du 30 septembre 2011 déterminant notamment les quantités d’œufs durs à servir en cantine scolaire selon l’âge des enfants ;
- adapter les normes fondées, mais qui « appliquées avec excès, conduisent à des situations absurdes ». Ainsi, dans une commune rurale de 500 habitants, le maire a l’obligation d’élargir les trottoirs afin que deux fauteuils roulants puissent se croiser ;
- alléger certaines normes dans des conditions compatibles avec la qualité et la sécurité, par exemple les normes d’encadrement dans les crèches, ou encore les procédures en matière de fouilles archéologiques ;
- revisiter les normes, c’est-à-dire les réexaminer régulièrement, notamment en rendant la commission consultative d’évolution des normes compétente pour examiner le stock de normes, et en prévoyant une clause de revoyure.
Les « sept péchés normatifs » des fédérations sportives font l’objet d’une attention particulière, car ils illustrent les effets pervers de la séparation entre « normeur » et « payeur ». Sont également cités les nombreux schémas que doivent élaborer les collectivités, (67 ont été recensés), les zonages et les normes européennes « surtransposées » au niveau national.
Mieux gérer le flux de normes
Pour Alain Lambert et Jean-Claude Boulard, le flux de normes doit être géré selon trois axes :
- moderniser notre droit, notamment en instaurant un principe de proportionnalité et de sécurité juridique. Les auteurs estiment également nécessaire de « tempérer le principe de précaution et de réhabiliter le droit au risque ». Un médiateur de la norme pourrait être nommé auprès du ministre chargé de la décentralisation afin d’instruire les éventuelles réclamations des collectivités en matière de normes ;
- prévenir le retour de l’inflation normative, en liant l’adoption d’une nouvelle norme à l’abrogation d’une autre, en réalisant des études d’impact ex post, etc. ;
- résister aux pressions externes, en particulier médiatiques, en empêchant par exemple qu’un texte porte le nom d’un élu.
À l’issue de la remise du rapport, le Premier ministre a annoncé que de nouvelles mesures pour alléger le poids des normes seront prises lors du Comité interministériel pour la modernisation de l’action publique du 3 avril, et que la liste des normes dont l’abrogation est proposée sera soumise aux ministères concernés pour une décision dans les semaines à venir.
Raphaëlle Frija